dimanche 23 août 2009

MOUSSA KAKA, JOURNALISTE NIGERIEN: «Le président Tandja m’a persécuté»

Le journaliste nigérien Moussa Kaka, correspondant de RFI, est en liberté provisoire. Et il s’offre des libertés. Il était récemment à Ouagadougou, dans le cadre du festival «Ciné droit libre». Le régime Tandja s’est «acharné» sur lui en 2007 et il a été inculpé puis emprisonné pour «complicité d’atteinte à l’autorité de l’Etat», notamment pour ses contacts avec les rebelles touaregs, pourtant réalisés dans le strict cadre de sa profession. Après avoir passé de longs mois en prison, Moussa Kaka parle…

«Le Reporter»: Où en est-on avec l’affaire Moussa Kaka?

L’affaire est en justice. Je suis en liberté provisoire. J’attends une éventuelle convocation du juge pour en finir avec cette question. Il est grand temps qu’on en finisse. Mes avocats, RFI et moi attendons que la vérité jaillisse et que la justice soit faite.

Avez-vous eu le sentiment d’avoir été persécuté par un homme politique, en l’occurrence le Président Tandja?

J’ai toujours été persécuté par ce monsieur. Ils se sont jetés sur moi avec acharnement. Mais aujourd’hui, je suis ravi, au regard de la crise politique qui bafoue la justice. Je les attends au tournant.

Qu’avez-vous, à l’heure actuelle, envie de dire au Président Tandja?

Qu’il aille doucement et qu’il sorte grandi de la situation actuelle.

Comment jugez-vous aujourd’hui la liberté de la presse au Niger?

La presse au Niger est libre. A ne pas confondre avec ce que la presse ne vous permet pas de dire ou de faire. La liberté d’expression existe. Il y a une panoplie de journaux, de radios et de télévisions. Mais dans la recherche de l’information, l’administration de l’Etat met des bâtons dans les roues de la presse. Cela crée des difficultés pour l’exercice du métier de journaliste. De plus, le Conseil supérieur de la communication, au lieu de défendre la presse, passe tout son temps à la condamner. Récemment, le président du CSC s’est permis de fermer un groupe de radios et de télévisions, à sa guise. Il n’a même pas réuni au préalable, tous les membres du Conseil.

Que reprochait-il à ce groupe de radios et de télévisions?

D’avoir diffusé un élément de l’opposition appelant les soldats à ne plus obéir au Président de la République. Tous les médias étaient au point de presse de l’opposition et ils ont tous diffusé l’information, à l’exception de la radio d’Etat. Cela a été un prétexte pour fermer cette antenne, certainement parce qu’elle gênait le pouvoir. Mais la direction du Groupe a attaqué la décision du Conseil en justice et cette dernière lui a donné raison. Alors que le quorum n’est même pas atteint, vous prenez une décision qui engage tout le Conseil supérieur de la communication. C’est une honte! Au moins dix membres du CSC se sont rétractés. Ils ont publié un communiqué pour dire qu’ils ne sont pas concernés par la décision du président et qu’ils n’ont pas, eux, décidé de fermer cette radio.

Etes-vous toujours correspondant de RFI au Niger?

Nous attendons la fin du procès pour que je reprenne le micro. Je continue de faire le travail mais autrement.

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué pendant que vous étiez en prison?

C’est l’acharnement dont j’étais victime chaque soir à la télévision d’Etat. A ma connaissance, depuis l’indépendance du pays jusqu’à ma libération, j’ai été le seul prisonnier sur qui la télévision d’Etat s’est acharnée du début à la fin de ma détention. Heureusement, la justice m’a donné raison et je suis sorti grandi de cette affaire.

Voulez-vous dire que la télévision d’Etat est contrôlée par le pouvoir de Tandja?

C’est la télévision d’Etat!

Mais l’Etat, ce n’est pas un groupe de citoyens. Ce sont tous les citoyens nigériens…

La radio et la télévision d’Etat sont contrôlées par l’Etat et le ministre de la Communication, Mohammed Ben Omar.

Propos recueillis par Hervé D’AFRICK

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