dimanche 23 août 2009

DEFENSEURS DES DROITS DE L’HOMME: Un métier à hauts risques

Pas facile d’être défenseur des droits humains. Certains d’entre eux sont traqués, arrêtés, emprisonnés, torturés et souvent tués sans autre forme de procès. La Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) nous a fait parvenir à ce sujet, ce texte digne d’intérêt.

Bukavu, 21 novembre 2008: Didace Namujimbo, journaliste à Radio Okapi, est abattu d’une balle dans la tête en rentrant chez lui. Un exemple parmi d’autres rapportés par le dernier rapport annuel de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme*, qui témoigne du danger encouru par les militants pour les droits fondamentaux dans certains pays du continent, comme la République démocratique du Congo ou la Somalie. D’autres gouvernements y sont également pointés du doigt, pour avoir cherché à étouffer toute voix critique ou à limiter les libertés d’expression, d’information et d’association.
Fait marquant en 2008, la hausse des mécontentements sociaux liés à la crise économique mondiale a accru la répression. Les émeutes de la faim qui ont secoué de nombreux pays ont toutes été sévèrement réprimées, et à l’origine de nombreuses entraves aux libertés d’expression et de réunion. Elles ont encore servi de prétexte à des arrestations arbitraires comme au Niger, au Cameroun, ou au Sénégal.
Cette situation s’est également mesurée à l’aune des nombreux obstacles posés à l’émergence de représentations syndicales indépendantes. A Djibouti, cette logique a été poussée jusqu’au bout, avec la création de centrales inféodées au pouvoir, et un harcèlement constant à l’égard des structures indépendantes. A l’instar de M. Adan Mohamed Abdou, de l’Union djiboutienne du travail (UDT), qui a été convoqué à plusieurs reprises en mai 2008 par le Gouvernement, et menacé de représailles.
La crise est aussi un élément de fragilisation des ONG sur le plan financier. Aussi, l’inflation de mesures législatives visant à contrôler, voire interdire les financements étrangers, au Soudan ou en Ethiopie par exemple, entrave à bien des égards leur fonctionnement.
Accuser les organisations qui osent dénoncer les violations des droits de l’Homme commises par les agents de l’Etat de faire le jeu des puissances ennemies demeure en outre une rengaine dans les pays en conflit, ou confrontés à des crises politiques majeures, comme au Tchad. Nous avons ainsi été pendant plus de trois semaines sans nouvelles de Jestina Mukoko, directrice du Projet pour la paix au Zimbabwe. Elle a finalement comparu le 24 décembre dernier, devant le Tribunal de première instance de Harare, où elle a été accusée de «trahison». Elle n’a toujours pas été jugée. Son seul tort : avoir dénoncé la violence politique dans son pays.
Les violations contre les défenseurs sont multiples : harcèlements, menaces, actes de torture, arrestations et détentions arbitraires, jugements inéquitables, etc. Elles touchent dans de nombreux pays toutes celles et tous ceux qui se battent contre toute atteinte aux libertés et aux droits fondamentaux. Les travailleurs humanitaires, les journalistes, les avocats, ou encore les observateurs électoraux sont également concernés par cet étouffement progressif des libertés.
Est-ce un hasard dès lors si la répression grandit bien souvent de façon proportionnelle aux succès rencontrés par les défenseurs dans leurs entreprises de lutte contre l’impunité ? L’intensification dans certains pays des représailles à l’encontre de celles et ceux qui se battent pour garantir le droit des victimes de violations des droits de l’Homme à une justice indépendante ressemblerait presque - si elle n’était aussi tragique - à une forme d’hommage rendu à leur efficacité. Le régime d’Al-Bashir n’a pas hésité, par exemple, en novembre dernier, à faire arrêter et torturer trois défenseurs soudanais pour tenter de leur soutirer des informations sur leurs activités.
Pour conclure sur une note plus optimiste, ce rapport fait également référence à des pays où la situation s’est globalement améliorée. Certains Etats comme le Burkina Faso, le Mali ou la Zambie ont vu s’accroître les possibilités de débattre librement des politiques publiques. Là encore, ces quelques victoires résultent d’un travail de longue haleine, de sensibilisation de la population et des autorités à la nécessité d’améliorer la situation des droits fondamentaux. C’est grâce au dévouement et à l’engagement de ces milliers de défenseurs en Afrique et à travers le monde que nous devons ces améliorations. En ces temps de crise, il convient plus que jamais de les soutenir.

- Souhayr Belhassen, présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)
- Eric Sottas, Secrétaire général de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT)

* L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme est un programme conjoint de la FIDH et de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT)


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